La vie à Baubau : chez Mario
Contrairement aux autres pays que j’ai pu visiter jusque-là, en Indonésie je suis resté au même endroit pendant la totalité de mon séjour. Une expérience inoubliable d’un mois à Baubau chez la famille de Mario, qui nous considèrent aujourd’hui comme des membres à part entière.
Ma famille indonésienne
La famille de Mario semble plutôt habituée à recevoir des invités qui restent longtemps parce que visiblement notre présence ne semblait pas avoir bouleversé leurs habitudes. Je vais vous présenter brièvement chacun des membres qui composent ce doux foyer (pas au niveau de la température par contre).
De gauche à droite :
- Visco : le beau-frère de Mario. Même s’il peut parfois afficher un visage à l’air faussement sévère, il était toujours en train de siffler et à nous proposer de manger telle ou telle chose qu’il avait achetée et ramenée à la maison.
- Lionel : le neveu de Mario. Âgé de 12 ans, il est plutôt timide. Je pense que c’est une des personnes de son âge qui parle le mieux anglais dans sa ville. Déjà parce qu’il s’est déjà fait des amis étrangers (allemands je crois) et qu’il a beaucoup communiqué avec eux mais aussi et surtout parce qu’il regarde quotidiennement beaucoup de vidéos Youtube en anglais. À mes yeux il parle même anglais mieux que son oncle Mario.
- Since : la mère de Mario que nous appelons “Auntie” (Tatie/Grande-Tante). Nous nous sommes assurés de prendre le plus grand soin d’elle possible, notamment en lui faisant régulièrement du thé chaï, ce thé indien épicé qu’elle ne connaissait pas avant et dont elle raffole désormais.
- Liebe : la nièce de Mario. Liebe, comme le mot allemand qui veut dire amour. C’est une chouette petite fille, espiègle et plein de malice. Elle était au départ un peu timide avec nous, surtout pour parler anglais, mais cette timidité s’est rapidement estompée et c’est clairement le membre de la famille avec lequel nous avons le plus échangé, hors Mario.
Mario était étonné de son très bon niveau d’anglais et ne pensait pas que sa nièce ne le parle aussi bien. À ce jour nous sommes toujours en contact et nous nous envoyons quelques messages par ci-par là. Elle me manque beaucoup avec sa petite bouille de Sud-Américaine : elle ne ressemble absolument pas à Lionel qui a une tête beaucoup plus asiatique.
D’ailleurs si vous regardez bien aucun membre de la famille de Mario ne se ressemble et c’est un peu mystère pour moi ! Certains des membres de cette famille ont la peau très blanche, typique des Indonésiens originaires de Manado, leur ville natale tout au Nord de l’ile, alors que Mario par exemple a une tête bien plus typique de la région. - Gita : la soeur de Mario et femme de Gisco (et mère de Lionel et Liebe mais ça vous l’avez déjà deviné si vous avez un minimum de jugeote). Très timide mais vraiment ravie que nous passions du temps avec ses enfants et que nous leur faisions pratiquer leur anglais et jouions avec eux. Elle a mis pas mal de temps mais vers la fin du séjour elle se sentait plus à l’aise pour nous parler, et elle avait moins peur d’utiliser son anglais qui est plus limité que celui de ses enfants.
- Mario : notre hôte sans qui tout cela n’aurait pas été possible. Très timide lui aussi, vous ne le verrez quasiment jamais sourire sur les photos. C’est un grand explorateur mais seulement de son pays : il n’est jamais sorti d’Indonésie ! Bon en vrai c’est tellement grand et tellement beau qu’il y a vraiment de quoi faire. Mais sachant qu’il aime énormément rencontrer des étrangers et découvrir leur culture, j’espère qu’un jour il pourra aller dans un autre pays histoire de ressentir un peu ce que nous avons ressenti en voyageant.
Toute la fratrie de Mario et Gita ne vit pas dans ce foyer, je crois me souvenir qu’ils sont cinq au total, à moins que ce soit sept mais peut-être que je confonds les chiffres avec une autre fratrie rencontrée en Malaisie .
La famille de Mario est chrétienne protestante, à l’exception de Lionel qui n’est pas trop attiré par ces choses-là. Ils sont très actifs et participent plusieurs fois par semaine aux nombreuses activités que propose leur église. Je le mentionne parce que l’immense majorité des habitants de la ville est musulmane.
En fait j’ai appris là-bas que l’Indonésie est même le premier pays musulman au monde avec environ 85 % de leur population qui pratique cette religion. En même temps, autre chose que j’ai apprise c’est qu’ils ont quand même 276 millions d’habitants (soit le 4ème pays le plus peuplé au monde), donc ils ont de la marge.
Sacrée Liebe, toujours en train de rire et de sourire.
Je l’ai surnommée Liekan quand nous étions en train de nous baigner à la plage : contraction de Liebe et ikan (le poisson en indonésien) et elle a depuis adopté ce surnom qu’elle aime beaucoup. Tu nous manques Liekan !
La maison
La famille habite dans une assez grande maison située sur un terrain pentu, à laquelle on accède en empruntant un grand escalier extérieur.
Dans le jardin et tout autour de la maison, la mère de Mario cultive tout un tas de plantes et de fleurs, ce qui donne un rendu vert et luxuriant, assurément relaxant. Dans le jardin se trouve même une passonaria, la liane qui donne les fruits de la passion. J’ai pu en goûter quelques uns et c’était très bon, pas du tout aussi acide que Giang ne le pensait, basé sur ses expériences passées.
La maison comporte un grand salon avec des fauteuils et des canapés, que personne n’a semblé vraiment utiliser pendant notre séjour, à l’exception de Lionel qui joue souvent sur son téléphone allongé sur le canapé du fond. Pour donner ses cours d’anglais privés, Mario utilise le deuxième petit salon, surélevé par rapport au grand salon.
En fait le vrai lieu de vie de la maison c’est la partie extérieure située derrière la maison. Sous un toit de tôles, on y trouve la cuisine et une petite mare avec des gros poissons. Le tout joliment orné des plantes cultivées par la mère de Mario : c’est un lieu très agréable et reposant où j’ai souvent télé-travaillé, jusqu’à ce que je réalise qu’en fait quand il faisait trop chaud (c’est à dire après 11 heures du matin), je n’étais pas du tout das les meilleures conditions pour télé-travailler.
L’eau, une ressource précieuse
S’il y a bien un truc que je n’avais jamais réalisé, c’est à quel point c’est facile pour nous d’avoir de l’eau directement depuis le robinet, et potable de surcroît. Bon ça je l’avais déjà un peu remarqué parce que dans les pays visités jusque-là, il me fallait quotidiennement acheter de l’eau en bouteille, sauf si la maison était équipée d’une machine qui filtre l’eau comme ça a pu être le cas au Vietnam ou en Malaisie.
Chez Mario il n’y avait pas de machine pour filtrer l’eau mais plutôt une machine servant de robinet à eau, dans laquelle il faut insérer un gros bidon de 20 litres. Cette fameuse machine se trouve dans ce qui est pour moi le point névralgique de la maison, c’est à dire dans la pièce intérieure où l’on trouve côte à côte le frigo, la machine à eau et le cuit-riz : lieu incontournable et nécessaire à la survie du foyer, vous l’aurez déjà deviné.
Seul petit hic pour moi : la même machine à eau sert à distribuer de l’eau chaude/bouillante et de l’eau froide. Quand on s’en sert, l’eau froide est plutôt tiède voire presque un peu chaude.
J’ai donc dû utiliser la bonne vieille technique des bouteilles dans le frigo ou le congélo, en vieux briscard aguerri par les voyages et tout-terrain que je suis.
On le sait tous, l’eau courante est une ressource précieuse qui n’est pas illimitée. Chez Mario on le ressent très bien et très vite. Chaque lundi, des membres du gouvernement passent et remplissent les 3 gros réservoirs à eau situés dans le fond du jardin. En fin de semaine, particulièrement le dimanche, le débit des différents robinets de la maison peut ainsi être bien réduit, puisque les réserves sont alors presque vides.
Un fait marquant, c’est bien sûr la douche qui se fait avec le combo seau d’eau + cassotte, le petit récipient en plastique qui sert de louche à eau. En fait j’ai appris le mot cassotte en rédigeant cet article. D’après les définitions lues sur Wikipédia , il s’agirait plutôt d’un mot régional : si vous avez le nom officiel et générique pour désigner le petit récipient en plastique avec manche utilisé pour récolter de l’eau, je suis preneur…
Même s’il fait chaud à Baubau, la douche à l’eau froide c’est quand même un peu particulier, surtout quand il faut manuellement se verser l’eau dessus. En général ça passe mais quand vous êtes fatigués, ce n’est clairement pas le plus agréable. Mais une fois encore ça reste une nouvelle expérience, même si ça implique de souffrir un peu tous les soirs.
Un autre fait marquant c’est le fait que le lave-linge se trouve à l’extérieur, dans le couloir situé sur le côté de la maison. Il s’agit d’un modèle de lave-linge que j’avais découvert en Malaisie
à Kepala Batas
et que je n’avais jamais vu auparavant : un lave-linge en deux parties.
La partie de gauche sert à laver et une fois le lavage terminé, il faut sortir tout le linge pour le mettre dans la partie de droite qui fait l’essorage. Il faut répéter l’opération une seconde fois pour que le linge soit vraiment lavé correctement. Pour remplir le lave-linge, on utilise l’eau qui se trouve dans les gros récipients juste en face, qui sont aussi utilisés pour se laver les pieds quand on revient d’un endroit sale (comme le marché aux poissons par exemple).
Petite photo bonus : l’évier de la cuisine a été construit à un niveau assez bas en raison des contraintes géologiques du jardin. Comme ça me cassait le dos à chaque fois que je faisais la vaisselle (c’est à dire tous les jours), j’ai essayé plusieurs techniques dont la vaisselle à genoux, ce qui faisait beaucoup rire Giang et Liebe.
L’eau étant une ressource précieuse à ne pas gaspiller, une bassine se trouve juste au-dessous du robinet, pour récupérer l’eau qui coule. C’est dans cette bassine que chacun met son assiette une fois qu’il a fini de manger : en effet les membres de la famille mangent très souvent de façon décalée les uns des autres, ce qui m’a pas mal troublé il faut bien l’avouer. Une fois les repas de chacun terminés, quelqu’un se charge de faire la vaisselle (souvent moi le midi !).
J’avoue que ce serait quand même plus simple que chacun lave son assiette mais bon allez savoir, la vie à l’autre bout du monde c’est forcément différent !
30 millions… d’amis ?
Un autre point que n’ai pas trop compris non plus, c’est le fait que la famille aie des chiens mais qui se trouvent uniquement enfermés dans un enclos sur le côté de la maison (juste à côté de la réserve d’eau dont je parlais). Les pauvres ! En plus ils ont l’air gentils mais je crois qu’ils ne sortent hélas jamais.
D’après Mario, ils servent à aboyer et prévenir en cas d’intrus. Moi je dis qu’ils pourraient tout à fait avoir le même rôle en n’étant pas enfermés. C’est vraiment le seul point sur lequel j’aurais aimé qu’ils changent leur façon de faire. Après maintenant qu’ils me considèrent comme un membre de la famille, je pourrais peut-être donner mon avis mais bon. En plus Mario les aime bien parce qu’ils vient régulièrement les grattouiller et jouer de temps en temps avec eux.
En guise de repas les chiens ont droit à une sorte de soupe, la moins ragoûtante au monde. Dans cette soupe sont mis tous les restes des repas, incluant les arêtes des poissons et les os de la viande. Pour des raisons d’économie, cette mixture est ensuite cuite non pas sur les plaques de cuissons principales mais sur le deuxième appareil. Celui-ci n’utilise pas de gaz mais un combustible solide qui ressemble plutôt à une sorte d’allume-feu, destiné à brûler longtemps. Je n’aime pas du tout l’odeur qui en résulte et qui sent très fort. Ajoutez à ce fumet l’odeur de cette soupe pour chiens et vous avez le combo gagnant pour que je retourne alors dans ma chambre.
Les chiens ne sont pas les seuls animaux autour de la maison. Juste à côté de l’enclos des chiens se trouve l’enclos des poules et des coqs, qui traînent parfois à l’extérieur quand la porte est mal fermée, et qu’il faut “chasser” doucement de la cuisine pour les faire revenir dans leur enclos. Je dis bien « des » coqs car il y en avait au moins deux, à moins que le deuxième ne se trouve dans un enclos mitoyen qui appartienne au voisin.
Mais le résultat est le même et vous connaissez les coqs : si un coq chante alors le coq d’en face chantera aussi, se lançant dans le concours de celui qui arrivera à avoir le dernier mot. Ce qui fait que dès tôt le matin les coqs chantent en boucle et tout ce vacarme m’a parfois empêché de travailler dehors. C’était quand même bien funky la vie dans cette maison, y’a pas à dire.
Climat tropical oblige, on trouve beaucoup de geckos qui se détendent tranquillement un peu partout sur les murs de la maison. Des fois on en croise des assez gros et je trouve que ça a une bonne tête quand même.
Quelques fois, j’ai cru voir une souris passer très rapidement dans notre chambre et se cacher sous un placard. Quand je le faisais remonter à Giang, cette dernière se moquait un peu de moi en disant : « Oh pauvre petit chou, il a peur d’une souris ! ».
Moi je n’ai pas vraiment peur des souris mais je ne suis pas non plus hyper à l’aise avec le fait de les savoir dans ma chambre quand je dors. Jusqu’à ce qu’un jour, Giang découvre que ladite souris avait mangé pas mal de ses réserves de biscuits salés et sucrés.
Coup dur pour la joueuse vietnamienne qui a alors complètement changé de point de vue et décidé que désormais elle détestait cordialement les souris !