Cebu 1/2 : un bien mauvais départ

Polluted canal lined with informal houses and scattered trash in an urban area.

Pour arriver jusqu’aux Philippines le trajet aura été une nouvelle fois très long puisqu’il nous aura fallu enchaîner pas moins de quatre avions pour atterrir sur l’ile de Cebu, rien que ça.

Des fois je me dis que moi aussi j’aimerais bien avoir mon jet privé quand même, après tout je l’aurais pas volé (jeu de mot aérien, décidément ça vole pas haut sur ce blog).

Les Philippines ça m’attirait énormément à la base. D’après les récits des voyageurs que j’avais rencontrés, c’était clairement la destination sur laquelle je nourrissais le plus d’attentes.

Mais tout n’est pas toujours comme on l’espère et des fois la réalité nous met des petites claques, claques dont la douleur sur la joue met un certain temps avant de s’estomper.

Logé, nourri, trahi

D’habitude nous optons systématiquement pour résider côté campagne, le plus loin possible des grandes villes. Toutefois on ne maîtrise pas toujours tous les paramètres et cette fois-ci ce n’était pas possible. Soit tout était complet soit tout était vraiment hors de prix. Nous nous rabattons alors sur l’option ville en séjournant à Lapu-Lapu, sur l’ile de Mactan voisine de Cebu.

Au passage pour la clarification : Cebu c’est à la fois le nom de l’ile et à la fois le nom de la ville principale de cette même ile.

Wow, séjourner sur une ile des Philippines, ça devait être la classe quand même non ? Faut croire que non ma p’tite dame et c’était même carrément tout l’inverse.

Le début des problèmes a commencé par des histoires de logement. Nous louons un premier appartement sur AirBnB et à l’arrivée nous constatons des fourmis dans un placard. Chose que je fais remarquer directement à la logeuse le soir-même quand elle vient nous livrer un bidon d’eau. Sa réaction :

« Ah, du coup vous avez trouvé le spray anti-insectes ? ».

Ça n’avait clairement pas l’air de l’étonner et pour cause : j’ai découvert au fil de mon voyage aux Philippines que des fourmis on en trouvait dans quasi toutes les habitations, peu importe le degré de standing de ces dernières.

Non là où ça ne s’est pas méga bien déroulé c’est au moment de partir et de rendre l’appartement. Giang me suggère alors de prendre des photos avant de quitter le logement au cas où. Moi je trouvais que clairement c’était exagéré mais elle avait manifestement eu un éclair de lucidité.

Voilà t’y pas que nous recevons quelques jours plus tard une notification d’amende AirBnB avec à chaque fois des motifs que nous ne comprenons et n’acceptons pas. On nous reproche d’avoir cassé des trucs que nous n’avons jamais utilisés et même mieux, d’avoir cassé quelque chose… qui nous appartenait et que nous avions oublié sur place ! Paye le sérieux de la réclamation.

Bon OK il y avait des cheveux dans le drain de douche mais après tout nous payons un surplus pour le nettoyage de l’appartement. Mais non AirBnB ne veut rien savoir et nous signifie que nous allons devoir payer l’amende annoncée. Aucun souci les amis, je gèle ma carte bleue (les cartes bleues virtuelles c’est la vie) mais je déplore quand même qu’AirBnB n’ait pas entendu nos arguments, qui étaient pourtant valables et accompagnés de photos en guise de preuve.

Aerial view of a crowded neighborhood with colorful rooftops and a nearby pool and basketball court.
Vue du 18ème étage : on voit bien le contraste entre les habitations de fortune aux toits de tôle et notre résidence avec piscine et terrain de basket

Finalement nous trouvons un meilleur logement mais qui reste somme toute assez cher. Tant pis, il vaut mieux payer un peu plus mais se sentir bien là où on est, surtout si on travaille à domicile : c’est primordial.

Par rapport aux standards de Lapu-Lapu, je pense que ce deuxième logement est un chouette appartement : spacieux, une jolie mezzanine, un gardien à l’entrée, une piscine, etc. Par rapport à mes standards personnels, je ne sais pas vraiment où il se situe !

Par moments il y a de grosses coupures de courant dans tout l’immeuble et ils doivent enclencher un méga générateur qui se trouve à l’extérieur et qui fait un vacarme infernal.

Régulièrement on peut entendre au loin des chiens et des chats en train de hurler ou se battre, ou se livrer à tout autre activité qui engendre des cris de leur part (et pas des cris joyeux si vous voyez ce que je veux dire).

Depuis notre appartement on peut aussi apercevoir au loin l’aéroport : la nuit on voit les rayons lumineux de la tour de contrôle qui balaient le ciel et qui donnent un petit côté flippant de période de guerre.

Ajoutez à ça le fait qu’on entende aussi très souvent retentir une sirène type 1er mercredi du mois (et qu’à ce jour je ne sais toujours pas quelle en est la raison) et vous commencez à comprendre à quel point l’atmosphère là-bas était tout sauf agréable, voire même carrément pesante.

Une atmosphère oppressante

N’ayons pas peur des mots, Lapu-Lapu et Cebu ville auront été jusque-là les endroits que j’aurais le moins aimés de tout mon voyage, et de loin.

D’abord la météo était un peu spéciale parce qu’il pouvait parfois se mettre à pleuvoir de façon très (très) violente. J’avais eu un peu d’entrainement avec la saison des pluies au Vietnam ou à Bangkok, mais là on était clairement pas sur le même niveau. C’est avec ce genre de pluies que j’ai compris comment ce pays pouvaient aussi régulièrement être sujet à des typhons. Quand on voit ce qu’il peut tomber sans arrêt, on imagine vite un pire scénario.

J’en parle souvent mais j’aime bien me promener en marchant. Là-bas ce n’est pas forcément possible parce que d’abord il n’y a pas souvent de trottoirs. Ensuite, quand il y en a, on se retrouve vite coincé pour traverser la rue parce qu’il n’y a jamais de feu pour piétons (un truc de fou ça) et que les quelques passages piétons qu’on peut trouver sur les artères principales et grouillantes de circulation peuvent tout simplement être obstrués par des grilles !

De toute façon, se promener en marchant n’est pas l’activité que je conseillerais le plus.

Suivant l’heure et l’endroit dans lequel on se trouve, il vaut mieux clairement faire attention et rester bien vigilant.

Depuis le début de mon voyage en Asie du Sud-Est, je me sens généralement très en sécurité, voire bien plus qu’en France.

Mais là ce n’est pas du tout le même sentiment qui m’habite. Je prends garde à bien tenir mon téléphone si je dois le sortir dans la rue et je vérifie également que les fermetures éclair de mes poches sont toujours bien fermées. Une fois, nous sommes allés à Lapu-Lapu dans un petit marché en début de soirée. Pour y accéder, il fallait à un moment emprunter un dédale de petits passages et j’ai bien cru qu’on allait pas tarder à me couper la gorge. Non vraiment, ce n’est clairement pas là où j’ai aimé faire mes courses !

C’est où alors me direz-vous ? Eh bien pas forcément au supermarché non plus. Le lendemain de notre arrivée, nous sommes allés faire des courses et les chants de Noël remixés à fond dans les enceintes, ça m’a cassé le crâne et ça m’a pas mis bien du tout dès le début de mon séjour. Si chez nous Noël arrive de plus en plus tôt, eux ils battent carrément des records parce qu’on était le 17 Octobre !

Ajoutez à cela que les légumes ne sont pas très variés et sont presque tous emballés dans du plastique : youpi la consommation de plastique à outrance en Asie du Sud-Est !

Petit aparté mais pour faire ses emplettes on peut aussi compter sur les très nombreux magasins de rue mais les choix sont évidemment assez limités, même si on pouvait tomber sur des prix relativement corrects au niveau des légumes ou de l’eau. Ça dépanne bien quand même, on va pas leur enlever ça au moins.

En parlant de légumes, non seulement ils n’avaient clairement pas l’air méga reluisants mais ils étaient aussi vraiment très chers. Je me suis étonné à l’époque du prix des oignons mais en faisant quelques recherches lors de l’écriture de cet article, je suis tombé sur cet article (en anglais) qui relate que début janvier 2023 les oignons étaient plus chers que la viande et pouvaient atteindre jusqu’à 10 € le kilo ! Les raisons sont multiples : guerre en Ukraine, typhons, mauvaises estimations prévisionnelles, etc.

Et croyez-moi que c’est pas avec ce que semblent gagner les habitants du coin qu’ils vont pouvoir s’en payer.

La pauvreté

Si au Vietnam je pensais que j’avais vu des gens bien pauvres , aux Philippines on était pas sur la même échelle non plus. On le ressent très vite, par exemple quand on voit des enfants qui mendient près des distributeurs :

Qui dit pauvreté dit trop souvent manque d’éducation et encore plus trop souvent saleté. Le concept des grosses poubelles en plastique et de centres de tri semble être encore nébuleux dans le coin et on aperçoit trop souvent encore des sacs d’ordures jetés dans la rue ou même en plein centre-ville, à proximité de jolis parcs.

Là où par exemple les habitants de Baubau en Indonésie n’avaient pas l’air très fortunés non plus, au moins ils avaient un cadre sympa où évoluer.

En plein centre-ville de Cebu, on se rapproche davantage de l’enfer sur terre que de la carte postale.

Les rues sont grouillantes et très sales, les gens vous regardent avec un air un peu bizarre et je ne sais pas trop comment le décrire mais l’atmosphère est vraiment pesante, vraiment oppressante.

Même la traditionnelle visite au marché que j’apprécie pourtant beaucoup n’a pas du tout la même saveur, loin de là.

Le marché de Cebu fait clairement ghetto et certaines fois, j’ai carrément dû renoncer à y rester parce que l’odeur était tout simplement insoutenable.

L’odeur de la viande en plein air je connais bien maintenant (comme à Biên Hòa au Vietnam par exemple), mais là c’était encore une fois une toute autre échelle. Décidément y’a un problème avec les échelles à Cebu et va falloir que quelqu’un songe à le régler rapido !

Bon au moins Benji, toi qui es de nature prudente, tu as su rester loin du danger non ?

Un bout de pastèque ?

Chaque aventure a son lot d’enseignements et Cebu m’aura appris que le danger peut venir de tous les côtés et que toute personne peut potentiellement représenter une menace.

Imaginez-vous la scène : un beau samedi ensoleillé, votre blogueur préféré entame sa journée en marchant tranquillement dans la rue qui mène à la grand-route. Il fait beau, il est de bonne humeur et comme à son habitude son regard se pose sur les personnes alentours, pour les observer un peu et tenter de percevoir comment ils vivent.

Tout à coup, son regard se pose sur une dame qui a l’air assez âgée et Benji se dit : « Tiens c’est marrant on dirait qu’elle porte un chapeau comme les musulmans, elle qui est en pays clairement catholique ».

Pas le temps pour lui de dérouler davantage le fil de ses pensées, voilà que la vieille dame croise aussi son regard et se met à l’invectiver très fort. Ce qui surprend beaucoup Benji qui ne s’y attendait pas du tout.

Mais pas le temps d’analyser trop la situation, voilà qu’elle commence à le poursuivre en lui jetant… des bouts de pastèque ! Elle braille et essaie de rattraper le pauvre Benji qui voulait pourtant passer un samedi matin paisible. Mais en vain !

Fort heureusement votre blogueur préféré, après plus de quatre mois de voyage, maîtrise désormais l’art de la course en tongs.

Courage, fuyons !

Cet adage est définitivement plein de bon sens et somme toute, on est pas passé loin de l’attentat fruité : un peu plus et c’était clairement le pépin pour le jeune blogueur français.

Plus de peur que de mal parce que j’ai réussi à semer rapidement cette autochtone enragée. Un peu plus loin, un chauffeur de tuk-tuk qui a vu la scène me demande si ça va : au moins il y a quand même des gens sympas sur cette ile, ça fait plaisir !

En faisant mes recherches pour l’écriture de cet article, j’ai appris (mieux vaut tard que jamais hein) que Lapu-Lapu était le nom d’un roi qui « entra dans la légende pour avoir été le premier responsable tribal à avoir résisté à la Colonisation des Philippines par les Espagnols » ( cf Wikipedia ). C’est aussi sous son commandement que Magellan a été tué. Je propose sobrement de rebaptiser cette ile en Benji-Benji, parce que moi à l’inverse j’ai réussi à résister à la vie sur l’ile et à ses habitants, je pense qu’ils me doivent bien ça.

Bon, même si ça a clairement été une mauvaise expérience et que j’aurais préféré un milliard de fois séjourner à la campagne (surtout quand on voit les endroits où je suis allé après), il y a quand même eu des trucs sympa à faire à Lapu-Lapu et à Cebu.

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